mardi 2 décembre 2014

C’est le grand patronat qu’il faudra jeter à la rue

On aura tout vu, voilà que le patronat organise une semaine de « mobilisation » ! Gattaz, le représentant du Medef, qui regroupe des grands patrons comme Pinault, Arnault ou Dassault, parle, sans rire, de la « souffrance des patrons ».

On imagine combien les fins de mois doivent être difficiles pour ce grand patronat qui se partage les dividendes des grands groupes. On imagine la souffrance des grands actionnaires de L’Oréal qui doivent se contenter des 2,9 milliards de profits nets quand la BNP Paribas en affiche 4,8 et Total 8,4 !

Quant au PDG de Sanofi qui a gagné 8,6 millions d’euros en 2013, soit 500 années de Smic, et Bernard Arnault, le patron de LVMH appointé à 8 millions, on les voit bien dénoncer les hausses d’impôts autour d’un repas à quelques centaines d’euros.

Ces « malheureux » ne se donneront tout de même pas la peine de manifester. Le Medef ayant prévu de s’en tenir à un meeting et une pétition, il n’y a aucune chance de croiser Arnault ou Pinault dans la rue. Il faut dire qu’ils n’ont pas besoin de défiler, puisque ce sont les ministres qui défilent à chacune de leurs réunions, et qu’ils peuvent s’inviter comme ils veulent à l’Elysée.

Non, ceux que l’on a vu battre le pavé, ce sont les petits patrons, ceux du bâtiment ou de la métallurgie, qui ont répondu à l’appel de la Confédération générale des PME. Autrement dit, le grand patronat a réussi à mobiliser derrière sa cause la grande masse des petits patrons qu’il est en train d’étrangler.


Les problèmes de nombreux petits patrons confrontés à la chute de leurs carnets de commandes sont réels. Mais ils le sont d’autant plus que les grandes entreprises et les banques ne leur font pas de cadeaux. Combien d’agriculteurs, d’artisans et de petits commerçants ruinés par la concurrence des Carrefour et autres Auchan ? Combien se sont vus refuser le crédit qui leur aurait permis de traverser une mauvaise passe ?

Les grands groupes traversent la crise sans encombres parce qu’ils la font payer aux travailleurs mais aussi parce qu’ils se servent des plus petites entreprises comme d’amortisseurs en arrêtant net leurs contrats ou en leur imposant des prix cassés.

Et l’inégalité ne s’arrête pas là. Quand une PME est effectivement taxée à 30 % au titre de l’impôt sur les sociétés, les entreprises de plus de 2000 salariés ne le sont, en moyenne, qu’à 13 %, et les entreprises du CAC 40 à 8 %. Et c’est sans parler des mastodontes comme Total qui réussissent à payer zéro euro d’impôt sur les sociétés.

L’ironie de la situation est que les petits patrons donnés en exemple vont porter des revendications qui ne sont pas les leurs. Qu’est-ce que cela peut changer, pour eux, que le dimanche devienne un jour travaillé comme les autres ? La plupart des commerçants y sont même opposés car ils savent qu’ils ne pourront tenir face à la grande distribution.

Nombre de petits patrons et commerçants savent que leur sort est lié à celui des travailleurs puisque leur chiffre d’affaires en dépend. Quand il y a des licenciements dans les grandes entreprises, ils savent qu’ils finiront, eux aussi, par en payer le prix.

Mais comme tous les patrons ils se disent accablés de « charges », dénoncent le coût du travail. Comme les gros, ils voudraient pouvoir être plus libres de licencier.

C’est plus fort qu’eux parce qu’ils ont, en commun avec le grand patronat, de faire partie des privilégiés de cette économie en vivant de l’exploitation des travailleurs. Ils en vivent plus petitement et plus difficilement parce qu’ils subissent la loi du plus fort et qu’ils sont bien des fois victimes de la voracité de plus gros qu’eux. Mais c’est leur système, et ils le défendent.

Le désespoir de certains d’entre eux sert d’alibi au Medef pour arracher de nouveaux cadeaux au gouvernement. C’est le grand patronat qui tirera encore son épingle du jeu, comme il le fait depuis que la crise a éclaté.

Les grands patrons ont tout pour eux. Ils sont à la tête de grands groupes qui ont des filiales partout dans le monde. Ils ont les banquiers à leurs pieds, quand ils ne sont pas aussi banquiers eux-mêmes. Ils ont guichet ouvert auprès des pouvoirs publics, ils ont mille et un moyens de s’arranger avec le fisc. Et, bien sûr, ils ont le gouvernement pour eux.

Hollande a fait tout ce qui était en son pouvoir pour favoriser le patronat et reporter le poids de la crise sur les travailleurs eux-mêmes.

Cette semaine « patronale » risque d’accélérer encore les coups portés contre la classe ouvrière. Pour les empêcher, ce sera aux travailleurs de se mettre en action et de revendiquer pour eux, pour leurs conditions de travail et pour leur vie.